Signalement

« SIGNALER CE N’EST PAS DÉNONCER, C’EST PROTÉGER » (Professeur Marcel RUFO).

Vous n’avez pas à être certain qu’un enfant soit maltraité pour faire un signalement !
Il suffit de penser qu’un enfant a probablement besoin d’être protégé.

Vous n’avez pas besoin de donner une preuve, ce n’est pas à vous de faire l’enquête.
Il faut fournir les éléments qui sont venus à votre connaissance.

L’article 44 du Code de Déontologie médicale impose au médecin de protéger le mineur et de signaler les sévices dont il est victime.

L’article 226-14 du Code Pénal délie le médecin du secret professionnel et l’autorise à alerter le procureur de la République.

Qu’est ce qu’un signalement ?

Le signalement est un terme juridique réservé à la transmission au Procureur de la République de faits graves nécessitant des mesures appropriées dans le seul but de protéger l’enfant.
Ce sont des faits dont nous avons été témoin ou qui nous ont été rapportés, témoignant d’un caractère de gravité ou d’urgence.

A qui signaler ?

Au procureur de la République du Tribunal de Grande Instance (TGI) du lieu des faits.

Comment signaler ?

Il peut être transmis par téléphone en cas d’extrême urgence.
Il sera confirmé par un document écrit (courrier suivi, mail ou fax), daté et signé. S’assurer de sa réception et en conserver un double.

Le signalement peut également être transmis par le président du Conseil Départemental après qu’il ait été lui-même saisi d’une information préoccupante via la CRIP :

  • Mineur ayant déjà fait l’objet d’une ou plusieurs actions sans que celles-ci n’aient permis de remédier à la situation.
  • Mesures ne pouvant être mises en place en raison du refus de la famille.
  • Impossibilité d’évaluation de la situation.

Conseils de rédaction

  • Doit être rigoureuse, tous les éléments recueillis doivent y figurer.
  • Affirmer que ce que nous avons vu ou entendu.
  • Ce qui n’a pas été constaté directement doit être rapporté à l’indirect, entre guillemets, ou au conditionnel.
  • Rapporter les dires en citant les mots exacts entre guillemets
  • Ne jamais entrer dans l’interprétation.
  • Ne pas mettre un tiers en cause : Désigner les individus selon leur lien avec l’enfant (mère, père, nounou …) et jamais nominalement !

Un signalement rédigé conformément à la loi ne peut faire l’objet de poursuite ou de sanction disciplinaire.

Rédaction

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Renseignements à faire figurer dans la transmission écrite :

  • L’identité du signalant, sa situation, son adresse.
  • L’identité de l’enfant concerné : Nom, prénom, date et lieu de naissance, adresse.
  • L’identité et l’adresse de chaque parent ou titulaire de l’autorité parentale.
  • La façon dont l’informateur a eu connaissance des faits et son lien avec la victime.

Décrire les faits, la date des évènements, donner une idée de leur ancienneté et de leur répétition, décrire l’environnement et le contexte (enfant déjà suivi par des professionnels, par un service …).
Décrire les conditions qui nous ont mis en contact avec cette information.

Rédiger le plus objectivement possible, sans jugement de valeur.

Décrire les constatations complètes et détaillées de l’examen clinique et des examens complémentaires, biologiques, radiographiques ou autres.


Conclusion :

  • Synthèse des éléments objectifs motivant le signalement.
  • Estimation du danger, degré d’inquiétude.
  • Nécessité OPP ou non.
  • Notion d’autres enfants au domicile, en précisant leur âge.

Et après ?

Le Procureur de la République (magistrat du Parquet auprès du Tribunal de Grande Instance), peut :

  • Renvoyer au Président du Conseil Départemental si les éléments sont insuffisants après enquête = Signalement administratif.
  • Saisir le Juge des enfants = Procédure civile = Signalement judiciaire.
  • Saisir le Juge d’instruction = Procédure pénale pour poursuivre l’auteur des faits.

Signalement administratif

Un signalement administratif peut entraîner une mesure éducative pour faire évoluer favorablement la situation familiale.
Un placement provisoire peut également être proposé, sur accord entre le conseil départemental et les parents.


Signalement judiciaire

Le procureur de la République dispose également de compétences civiles pour protéger un mineur. Il peut ainsi :

  • Procéder à une évaluation de la situation (renseignements d’ordre socio-éducatif sur la situation du mineur).
  • Saisir le Juge des Enfants : Ouvrir un dossier d’assistance éducative.
  • Ordonner le placement provisoire du mineur en cas d’urgence et de danger immédiat pour l’enfant. Cette OPP (ordonnance de placement provisoire) doit s’accompagner d’une saisine du Juge des Enfants dans les huit jours.

Le Juge des Enfants (magistrat du Tribunal de Grande Instance) s’occupe des mineurs en danger et des mineurs délinquants. Il décide et met en œuvre des procédures d’assistance éducative.
Le Juge des Enfants est celui du lieu de résidence du mineur.

Les père, mère, tuteur, personne ou représentant du service à qui l’enfant a été confié sont informés de l’ouverture de la procédure.

Après les avoir informées des motifs de la saisine, le Juge des Enfants auditionnera chacune de ces personnes, ainsi que l’enfant capable de discernement (qui peut exprimer un avis réfléchi grâce à sa maturité et son degré de compréhension).

Il s’efforcera, dans la mesure du possible, de recueillir l’adhésion de la famille à la mesure envisagée, mais à défaut il pourra imposer sa décision.

Les décisions du Juge des Enfants peuvent consister en :

  • Non-lieu en assistance éducative.
  • Une mesure d’investigation portant sur les conditions de vie et la personnalité des parents et de l’enfant : Mesure judiciaire d’investigation éducative (MJIE).
  • Un maintien de l’enfant dans sa famille avec un accompagnement éducatif et/ou la soumission à des obligations particulières : Action éducative en milieu ouvert (AEMO) (dites alors AEMO judiciaire).
  • La mesure judiciaire d’AGBF (Aide à la Gestion du Budget Familial) : Mesure d’assistance éducative décidée par le Juge des Enfants si les prestations familiales ne sont pas employées pour les besoins de l’enfant.
  • Un retrait de l’enfant de son milieu actuel pour le confier à une personne ou un service chargé de le protéger : Placement de l’enfant.
    La décision de placement est susceptible d’appel par les parents dans les 15 jours après la notification du placement.
    Elle est pratiquement toujours conçue comme provisoire, par périodes renouvelables jusqu’à la majorité de l’enfant.

Procédure pénale (poursuivre l’auteur des faits)

Le Procureur de la République dispose d’une compétence d’ordre pénal lorsque les faits signalés sont susceptibles de constituer une infraction.
Il peut ordonner des investigations complémentaires par le biais d’une enquête de police ou de gendarmerie (Brigade des Mineurs).

A l’issue de l’enquête pénale, le Procureur disposera de trois options :

  • Classer sans suite le dossier (infraction insuffisamment caractérisée, auteurs non identifiés).
  • Prendre des mesures alternatives aux poursuites : Rappel à la loi, mesures d’aide et de réparation, médiation …
  • Ordonner des poursuites : Affaire sera jugée devant une juridiction de jugement (Tribunal Correctionnel ou Cour d’Assises), c’est-à-dire qu’il y aura un procès.

S’il existe une confusion ou une opposition d’intérêt entre l’enfant et ses représentants légaux (notamment lorsque le ou les parents sont eux-mêmes auteurs d’une infraction), un juge pourra désigner un administrateur ad hoc chargé de représenter le mineur et de défendre ses intérêts.
La fonction d’administrateur ad hoc est différente de celle de l’avocat. Un avocat conseille et assiste son client dans la procédure judiciaire. Alors que l’administrateur ad hoc représente l’enfant, provisoirement, en lieu et place de ses représentants légaux, dans cette même procédure.

Source : Agir contre la maltraitance – Guide juridique à l’usage des professionnels de l’enfance

Mis à jour le 16 mai 2022


Sources :

Haute Autorité de Santé. « Maltraitance chez l’enfant : repérage et conduite à tenir ». https://www.has-sante.fr/jcms/c_1760393/fr/maltraitance-chez-l-enfant-reperage-et-conduite-a-tenir

Santé, Ministère des Solidarités et de la, et Ministère des Solidarités et de la Santé. « Agir contre la maltraitance – Guide juridique à l’usage des professionnels de l’enfance ». Ministère des Solidarités et de la Santé. https://solidarites-sante.gouv.fr/ministere/documentation-et-publications-officielles/guides/article/agir-contre-la-maltraitance-guide-juridique-a-l-usage-des-professionnels-de-l.

Nathanson, M., J. Oxley, et M. Rouyer. « Maltraitance envers les enfants et les adolescents ». Journal de Pédiatrie et de Puériculture 24, no 6 (1 décembre 2011): 295‑305. https://doi.org/10.1016/j.jpp.2011.10.004.

« Guide destiné aux médecins libéraux face à l’enfant en danger ou en risque de danger – URPS Médecins Libéraux PACA ». https://www.urps-ml-paca.org/guide-destine-aux-medecins-liberaux-face-aux-violences-faites-aux-femmes-2/.

Kahn-Bensaude, Dr Irène, et Dr Jean-Marie Faroudja. « Signalement et information préoccupante », s. d., 9.